Il ne sera plus jamais le nouveau Poulidor ! Après avoir collectionné les places d’honneur sur le Tour de France (2e en 2016, 3e en 2017), sur les championnats du monde (2e en 2018), sur Liège-Bastogne-Liège (3e en 2018, 2e en 2024) ou encore sur des étapes du Giro, Romain Bardet ne s’était pas seulement l’un des palmarès les plus solides de sa génération chez les coureurs français, il avait aussi entretenu malgré lui une image de perdant magnifique. Avec la victoire conquise hier à Rimini, il endosse pour la première fois de sa carrière le Maillot Jaune que son illustre prédécesseur n’avait jamais réussi à porter. Mais parviendra-t-il à le conserver au-delà d’une journée, alors que se profile une bataille de tous les diables dans le final de l’étape dessinée sur 199 kilomètres entre Cesenatico et Bologne ? « Mon bonheur c’est de le porter demain », affirmait-il hier après l’avoir enfilé, conscient que la double ascension de la côte de San Luca, dont le sommet ne sera plus qu’à 12 km de l’arrivée lors du deuxième passage, pourrait mettre fin à son aventure au sommet du classement général.
Romain Bardet aborde la deuxième étape avec 4’’ d’avance sur son jeune coéquipier Frank van den Broek, qu’il désigne comme co-artisan de sa victoire, mais surtout 15’’ de marge sur Tadej Pogacar, qui pourrait bien décider d’enclencher la vitesse supérieure dès aujourd’hui. Un concours de punch se jouera certainement sur ce véritable mur de 1,9 km à 10,6 % de pente moyenne, où le champion slovène tient une occasion de montrer que sa forme affichée en Italie il y a quelques semaines reste d’actualité sur le Tour… en Italie ! L’escalade à la basilique de San Luca se classe parmi les haut-lieux du cyclisme, pour avoir été plusieurs fois au programme du grand tour national, mais aussi pour accueillir l’arrivée du Giro d’Emilia, une semi-classique qui précède de peu à l’automne le Tour de Lombardie que « Pogi » a gagné trois fois. La perche est tendue pour le leader des UAE Emirates. Mais pour l’instant, cette route est surtout marquée de l’empreinte de son compatriote Primoz Roglic, le plus grand expert des lieux. Avec son ancien maillot, le tout nouveau leader de Red Bull-Bora-Hansgrohe a tout simplement triomphé à trois reprises sur le Giro d’Emilia (2019-21-23), mais aussi lors du dernier chrono du Giro jugé à San Luca, en 2019. Dans ce contexte, et même si cette fois-ci il faudra encore préserver un éventuel avantage en plongeant sur Bologne, les deux Slovènes seront les hommes en vue dans le final. Seront-ils encore dans le champ de vision du Maillot Jaune français ? C’est la condition de sa survie au sommet.